Le blog de Raphaël Mahaim

Tendre la main n’est pas un crime

Tendre la main n’est pas un crime

par | Jan 28, 2013 | démocratie, Droits fondamentaux, Migration | 0 commentaires

photoLa tournure qu’a prise le débat sur la mendicité et l’épilogue (provisoire?) qu’il est sur le point de connaître à Lausanne m’attristent grandement. La démocratie est ainsi faite que toute question de société peut et doit être discutée et disputée. La mendicité fait partie de ces questions. (article publié dans 24 heurs du 28.01.2013)

Mais il y a de beaux et de moins beaux débats. Je classe sans hésiter celui sur la mendicité dans cette seconde catégorie. L’agitation politico-médiatique orchestrée sur le dos de personnes qui n’ont pas leur mot à dire me désole au plus haut point.

Pour mémoire, on parle à Lausanne de personnes en grande précarité qui gagnent une vingtaine de francs par jour “grâce” à la mendicité. On relève en passant le caractère grotesque de l’initiative “Stop à la mendicité par métier”. Comme si l’on pouvait mendier “par hobby”, juste pour le plaisir, en dehors des heures de bureau.

Veut-on vraiment faire croire que la mendicité est un problème prioritaire? Si l’on offrait à cent habitants de nos villes la possibilité de réaliser un seul voeu, combien choisiraient de punir la mendicité? N’y a-t-il pas d’autres défis plus importants à relever pour la qualité de la vie en ville et les générations futures?

Nul doute que certains « mendiants » commettent des incivilités ou portent atteinte à la tranquillité publique, voire se rendent coupables d’actes délinquants. Mais ce sont alors ces comportements qui sont répréhensibles, pas le fait de tendre la main. S’il y a traite d’êtres humains ou d’enfants, le code pénal permet déjà de sévir. Il faut mettre un terme au bal des amalgames. La mendicité pour elle-même n’est pas un crime.

Interdire la mendicité permettrait d’extraire ces personnes de leur condition, entend-on fréquemment. Balivernes! On ne fait que déplacer le problème. Ceux qui citent New-York en exemple ne sont manifestement pas allés à Newark ou dans le Bronx. Il se pourrait même que l’interdiction contraigne ceux qui la pratiquent à la petite délinquance, avec pour conséquence de renforcer le sentiment d’insécurité.

Certes, les autorités lausannoises n’étaient pas dans une position aisée. Face à l’initiative populaire, l’attentisme n’était pas une solution. Mais si l’objectif était d’éviter un débat indigne et de faire obstacle aux propositions les moins raisonnables de l’initiative, alors il n’est clairement pas atteint avec le contre-projet en passe d’être adopté.

Les partisans d’une répression de la mendicité préparent la prochaine offensive. Au Grand Conseil, une motion UDC demande d’interdire la mendicité sur tout le territoire cantonal. Aux oubliettes, le discours prétendument nuancé des initiants lausannois, l’autonomie communale, la dignité humaine, ou encore les difficultés pratiques d’une telle interdiction, comme à Genève où l’on doit envoyer des amendes en poste restante au fin fond de la Roumanie.

L’Eglise protestante et quelques associations ont eu le courage de dénoncer la dérive du discours ambiant. Nous devons suivre cette voie et montrer que l’interdiction de la mendicité ne conduit nulle part.

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